Offrir des espaces safe de pratiques artistiques : une dynamique du Cabaret Aléatoire
À l’aube du lancement du dernier projet coproduit par le Cabaret aléatoire et Act Right intitulé Move ur gambettes, c’est l’occasion de rencontrer Justine Noël, chargée de projet attachée aux pratiques culturelles et artistiques au Cabaret Aléatoire pour qu’elle nous parle de leurs derniers projets inclusifs.
Le Cabaret Aléatoire est une salle de concert et un club, situé à Marseille qui œuvre depuis sa création en 2003, au rayonnement de la scène locale et nationale, principalement des artistes de musiques électroniques. Niché au cœur de La Friche la Belle de Mai, le Cabaret aléatoire accueille entre 60 et 70 000 spectateur·trice·s chaque année. Fortement impliqué dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles en milieu festif et plus globalement sur les questions d’égalité et de diversité, l’équipe du Cabaret aléatoire a porté de nombreux projets en ce sens comme IELS MIX ou VOI.IELS jusqu’au dernier Move ur gambettes.
VOI.IELS est un dispositif d’accompagnement pour les femmes et minorités de genre en voie de professionnalisation dans les esthétiques rap et hip-hop. En collaboration avec Sonica Vibes et Baham Prod, deux structures de production marseillaises engagées sur les questions d’égalité, 8 artistes ont été accompagnées pendant 5 journées dans leur professionnalisation (coaching scénique, confiance en soi, administration, communication).
IELS MIX, quant à lui, est né d’une rencontre avec Bernadette, une DJ grenobloise en recherche d’espaces disponibles pour enseigner le mix aux femmes et personnes minorisées. Il s’est finalement construit sous la forme d’un dispositif d’accompagnement d’un an, pendant lequel 8 artistes seront accompagnées. Elles ont été encadrées par plusieurs artistes de musiques électroniques telles que Lisa, Laze ou encore L.Atipik.
Entretien avec Justine Noël
Pour nous, la musique c’est un medium, pour toucher à des enjeux d’inclusion, d’ouverture, de protection…
Nous avons tout d’abord demandé à Justine quelle(s) utopie(s) se cachaient derrière ces projets ?
Qui embarquez-vous dans le projet Move ur gambettes ?
JN : Déjà, toutes les personnes qui ont participé aux autres projets et qui nous ont fait leurs retours sur les points forts et pistes d’amélioration, ce qui a permis de repenser le projet et de l’adapter aux besoins des participant·e·s. L’une ayant participé à IELS MIX est invitée au jury de sélection des candidat·e·s, par exemple aux côtés de Bernadette, Claire Lametri, cheffe de projet Act Right, les artistes et productrices Glodie B, Laze… Au niveau des partenaires, on embarque aussi des médias locaux comme Radio Grenouille ou l’AMI (Aide aux Musiques Innovantes) qui est une pépinière d’artistes. Il y aura aussi un collectif d’éducation populaire féministe qui s’appelle rEGALons-nous qui viendra travailler les questions d’empowerment, de confiance en soi. L’idée c’est aussi de créer des ponts entre les différents projets. Par exemple, nous avons un autre projet “technique mix” en direction des femmes et personnes minorisées qui souhaiteraient compléter leurs formations en son et lumière par la pratique sur du matériel différent de celui qu’iels ont au sein de leurs formations. On aimerait pouvoir impliquer des participantes sur les autres projets pour assurer la partie technique.
Quel est le moment que vous avez hâte de vivre sur ce projet ?
JN : La première rencontre en septembre prochain ! La première rencontre avec les participantes, les intervenantes… Après j’ai hâte de vivre tout le projet en lui-même, les sessions d’ateliers, les coachings scéniques… voir évoluer les artistes, se questionner…
De voir des personnes qui ont envie de pratiquer – qu’elles soient amateures, professionnelles ou juste qu’elles aiment la musique – et qu’elles aient la possibilité de le faire
Sur les projets déjà menés que nous avons évoqués, est-ce qu’il y a un élément qui t’a agréablement surpris ?
JN : Sur VOI.IELS, c’est la cohésion d’équipe, du groupe. Elles ont passé 4 jours H24 ensemble et elles ont créé un groupe hyper soudé, elles se soutiennent, partagent des plans pour jouer, sont présentes les unes pour les autres. C’est vraiment un projet qui a permis de mettre en lien des personnes qui ne se seraient peut-être jamais croisées. Sur un projet comme IELS MIX, c’est la façon dont Bernadette embarque tout le monde dans l’apprentissage du mix. Dès le premier jour, les intervenantes n’étaient pas encore arrivées, elle nous a mises, ma collègue et moi, directement derrière les platines pour nous faire pratiquer. Elle a une personnalité, une énergie de transmission qui est dingue, elle arrive à instaurer un espace où chacun·e peut s’exprimer, sans jugement, comme iel le souhaite. Et puis ces projets ont mis en lumière à quel point il y avait du monde qui avait envie et besoin de ces espaces pour pratiquer : sur un atelier d’initiation à la MAO (Musique assistée par Ordinateur) avec Beats by Girlz, on a reçu 35 candidatures – juste sur Marseille – pour 12 places ! On aimerait qu’il y ait des dispositifs adaptés à tou·te·s aussi bien sur de l’initiation, que de la formation approfondie ou de la professionnalisation.
Et au contraire, est-ce qu’il y a des éléments ou moments qui vous ont questionné·e·s voire éprouvé·e·s ?
JN : Sur le projet IEL.S MIX, on a identifié la nécessité pour les intervenants de s’inscrire sur un temps plus long dans la rencontre avec les participant·e·s pour que la transmission soit faite dans les meilleures conditions. Sur le projet VOI.IELS, il y a eu un vrai enjeu sur la coordination notamment parce qu’on était trois structures coproductrices, donc il y a pu y avoir quelques difficultés sur la répartition de la production et la coordination. En plus, le projet s’est tenu sur une période où on était en réorganisation suite à mon arrivée et au départ de ma prédécesseure, ce qui a parfois floué les repères et complexifié la gestion logistique, or je pense que c’est un aspect très important. Ce type de projet implique des personnes qui viennent dans le cadre d’un temps d’apprentissage et de transmission, il me semble que l’accueil participe de l’ambiance qui peut se créer ou non à ces endroits-là.
Quelle(s) figure(s) féminine(s) vous inspirent ces projets ?
JN : Pour le coup, Bernadette m’a beaucoup inspirée sur ces projets, Aurélie Berducat aussi, ma prédécesseure qui a vraiment créé de l’espace et des possibilités autour de ces enjeux pour pouvoir monter ces projets. C’est une personne inspirante dans les idées et les projections de développement… Mais j’ai envie de dire les femmes en général, celles que je rencontre avec leurs idées, leurs envies, les femmes qui me sont proches mais aussi les artistes féminines que je vois, que je rencontre…
En savoir plus sur les projets du Cabaret Aléatoire
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